Marie-Victorin 1922 - - - Plante : le chardon de Mingan
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Pour un enseignement scientifique

Marie-Victorin, 1928 Dans le premier quart du 20e siècle, l'Université de Montréal, comme le Québec, est en crise. Une crise économique, certes, mais aussi une crise morale. En effet, l'enseignement entre dans de grands débats qui détermineront de son futur. Et la bataille flambe de tous côtés.

Le frère Marie-Victorin, qui n'a jamais eu la langue dans sa poche, est l'un des premier à monter au front. Il réclame un enseignement adapté au nouveau contexte mondial, caractérisé par le rapide progrès scientifique, économique et industriel. Le professeur est ainsi convaincu que les déficiences de la culture canadienne-française viennent de carences dans le domaine scientifique. Mais il n'est plus le seul à se battre.

Laboratoire de l'Institut du Radium À l'Université de Montréal, son influence s'est étendue. Il défend une conception de l'homme de science et du professeur d'université qui rejoint celle des jeunes professeurs qui débarquent d'Europe. Ceux-ci l'admirent et le soutiennent lorsqu'il se bat, au Conseil de la Faculté des Sciences, pour le développement de la science de la géologie . Bien sûr, l'Université s'enorgueillit d'un Institut du Radium. L'École Polytechnique et le Laboratoire de botanique du frère Marie-Victorin exercent un certain rayonnement. Mais ce n'est pas assez pour le frère Marie-Victorin qui veut ériger son " département " de botanique en Institut et propose la même chose pour les autres disciplines. Il conçoit même un plan d'organisation des certificats de sciences naturelles qu'il présente dans un texte paru dans Le Devoir ( Les sciences naturelles dans l'enseignement supérieur, Le Devoir, 6, 7 octobre 1930).

L'abbé Alexandre Vachon L'École de Chimie de l'Université Laval entre elle aussi dans le débat avec en premier plan Adrien Pouliot et l'abbé Alexandre Vachon. Tous tendent au même but : donner accès à la société canadienne-française à la haute culture scientifique. Mais tous se heurtent au même obstacle : le manque de préparation au niveau secondaire.



Débats sur l'enseignement secondaire

Ainsi, plusieurs professeurs se plaignent que les élèves du secondaire ne sont pas assez bien préparés à l'enseignement scientifique. Lorsqu'ils débarquent à l'université, les carences ne sont pratiquement pas rattrapables. Mais surtout, peu d'entre eux choisissent le domaine des sciences qui leur est à toute fin pratique inconnu. Comment dans ces conditions construire une élite scientifique formée de Canadiens français?

Il s'agit de l'éternelle querelle entre modernes et classiques. Les modernes souhaitent l'adaptation de l'enseignement secondaire à l'évolution scientifique. Les classiques tiennent à conserver tels quels leurs collèges et l'enseignement qu'on y dispense. Cet enseignement est basé sur les humanités classiques : latin, grec, lettres, philosophie, etc.

Seulement, au Canada français, la querelle se double d'une complication particulière : certaines personnes souhaitent, à travers cette modernisation, réduire la part des disciplines et des professeurs ecclésiastiques, ce qui, bien sûr, ne fait pas du tout l'affaire du clergé. La querelle prend ainsi le reflet d'une antinomie entre science et foi, ce que réfute le frère Marie-Victorin :

Ce préjugé s'appuie sur des défections, sur des coïncidences, sur des cas particuliers toujours. Toutes une série de maximes, voire de textes sacrés, tendancieusement interprétés, aboutissent à accréditer dans les cerveaux jeunes l'idée monstrueuse sinon d'une incompatibilité théorique entre la science et la foi, du moins d'une sorte d'incompatibilité pratique, chez le même homme, d'une science étendue et d'un sentiment religieux intense ("La science et nous. Questions d'attitudes", Le Devoir, 13, 15 novembre 1926.)

Pour le frère Marie-Victorin, il va même dans l'intérêt de la religion de mieux préparer les jeunes gens à faire face au nouveau monde civilisé et il incite le clergé à prendre la tête de l'enseignement scientifique.


Mobilisation

Pavillon principal de l'Université de Montréal En 1932, la crise est à son apogée. L'Université de Montréal, qui a engagé tout ses fonds et hypothéqué tous ses immeubles, songe à fermer des facultés et à supprimer des départements, dont le département de botanique ! Ce serait une catastrophe pour le frère Marie-Victorin. Il reçoit, certes, des offres de toutes parts, mais cela ajoute à son inquiétude de voir se disperser le personnel spécialisé depuis la création de la Faculté des sciences. Il publie un nouvel article percutant dans Le Devoir, intitulé "Dans le maelström universitaire "(31 mai 1932), pour dénoncer ceux qui envisagent de fermer les Facultés de Lettres et de Philosophie et les départements ou laboratoires qui sont dits " de petites sciences ", comme la botanique. Certains voient sa démarche d'un mauvais oeil et des pressions sont faites à ses supérieurs ecclésiastiques pour le faire taire.

Jules Brunel, Sir Albert Charles Seward, Marie-Victorin et Jacques Rousseau Mais rien ne l'arrête. Avec l'aide de collègues, de Jules Brunel et de Jacques Rousseau, il forme le " Comité des Professeurs " le 25 septembre 1933, dont il est le secrétaire actif. Il continue parallèlement ses travaux de recherches et sa participation au sein des autres sociétés savantes. Bientôt, il aura l'occasion d'attirer les yeux du monde entier sur l'Université de Montréal.


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