Marie-Victorin 1922 - - - Plante : le chardon de Mingan
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L'Anticosti-Minganie

Marie-Victorin tenant un chardon de Mingan Chaque été, de 1924 à 1928, le frère Marie-Victorin explorera avec le frère Rolland-Germain un nouveau et grand territoire : l' Anticosti-Minganie. Les deux botanistes y feront de nombreuses découvertes.

Le départ pour la première exploration a lieu le 8 juillet 1924. L'objectif : recueillir 10 000 plantes. Les deux frères mettent une semaine pour arriver à Havre-Saint-Pierre, d'où ils s'embarquent pour l'archipel de Mingan. Là-bas, ils explorent leur nouveau territoire à bord d'un ancien bateau de pêche retapé, le Virginia.

À l'île de Quin, ils mettent la main sur trois espèces nouvelles. D'abord un étonnant pissenlit qui semble très répandu dans la Minganie et l'Anticosti. Les deux hommes sont encouragés et redoublent d'ardeur. La découverte suivante les met en joie : un type nouveau de chardon, que les deux frères n'auraient jamais pensé pouvoir trouver en marge du Golfe Saint-Laurent ! Le frère Marie-Victorin est enchanté de la trouvaille de cette belle plante, témoin de la flore pré-glaciaire, sans doute signe d'une évolution plusieurs fois millénaire ! Il l'appelle le " chardon de Mingan " ou Cirsium minganense. Une troisième découverte les attend sur l'île de Niapisca, où ils recueillent une petite plante sans fleur, un Botrychium plutôt jaunâtre, qui paraît être aussi une nouvelle espèce. Ils la nomment Botrychium minganense. Marie-Victorin avec le professeur Merritt Lyndon Fernald

C'est déjà la fin du voyage. Leurs objectifs atteints, les deux frères retournent à leurs activités professionnelles. En novembre, le frère Marie-Victorin visite le Gray Herbarium de l'université Harvard et rencontre, enfin, son maître et précurseur, le professeur Fernald à qui il fait part de ses découvertes. Celui-ci lui confirme ses hypothèses. Le chardon, bien qu'il se rapproche du Cirsium folium, présente assez de particularités pour constituer une nouvelle espèce. Il nomme le pissenlit Taraxacum laurentianum.


Nouvelles découvertes

Frère Rolland-Germain En 1926, nos deux explorateurs débarquent à l'île Sainte-Geneviève, où ils avaient remarqué l'année précédente une colonie de Senecio pseudo-arnica en mauvais état. Ils en avaient conclu qu'elle devait souffrir d'une maladie. Mais cette année, l'examen des spécimens montre qu'il s'agit plutôt d'une mutation. Le Sececio pseudo-arnica var. rollandii ou Senecio rollandii sera sans conteste leur plus importante découverte. Les deux botanistes considèrent cette plante comme le représentant le plus authentique de la flore de l'Anticosti-Minganie.

De plus, au sommet de l'île à la Vache Marine, le frère Marie-Victorin découvre un beau spécimen de cypripède à labelle blanc, une belle orchidée appartenant à l'espèce Cypripedium reginae (cypripède royal) qui a échappé aux botanistes américains qui ont travaillé dans la région !

En 1927, ils emmènent avec eux un jeune trappiste, élève du frère, le père Louis-Marie, qui est professeur à l'Institut Agricole d'Oka. Cette année-la, et l'année qui suivra, nos botanistes ne cesseront de mettre à jour des espèces nouvelles sur le territoire de la Minganie et de la Côte-Nord. Ils envisagent même de réunir les résultats de ces explorations dans un ouvrage, mais le frère Marie-Victorin est à nouveau happé par la maladie. L'herbier universitaire comporte désormais plus de 25 000 spécimens. Et toutes ces découvertes forment un matériel appréciable pour le projet de nouvelle Flore sur lequel travaille le frère Marie-Victorin, surtout que plusieurs d'entre elles soulèvent d'intéressants problèmes d'évolution et de génétique, comme c'est le cas du Senecio rollandii.

Omer Caron et Jacques Rousseau Les collaborateurs du frère ne chôment pas non plus. Le frère Adrien herborise sur l'île de Montréal et prend de nombreuses photographies; Jacques Rousseau explore l'estuaire du Saint-Laurent et Jules Brunel effectue des travaux d'algologie dans la région montréalaise en compagnie d'une assistante, Cécile Lanouette.


Trois continents

Carte de l'étinéraire du voyage de 1929 du frère Marie-Victorin La renommée du frère continue de s'étendre à travers ses travaux et ceux de ses assistants et disciples. Les excursions en Minganie ont permis d'élucider quelques questions de taxonomie et d'aires de répartition. Le frère Marie-Victorin a bâti certaines hypothèses que confirment les travaux de géologie de William Henry Twenhofel, professeur renommé de l'université du Wisconsin, avec qui le frère Marie-Victorin correspond. En outre, on publie la version anglaise de Récits Laurentiens : The Chopping Bee and other Laurentian Stories, traduit par James Ferres.

Il n'est donc pas étonnant que l'Université de Montréal choisisse Marie-Victorin comme délégué au Congrès de la British Association for the Advancement of Sciences, à Cape Town en Afrique du Sud. C'est le début d'une longue aventure, d'un long voyage sur trois continents qui durera six mois, riche en photographies d'archives.


Embarquement

Marie-Victorin près d'un leucospernum sp à Capetown Ainsi, le 17 mai 1929, le frère Marie-Victorin part de Québec en compagnie de Francis E. Lloyd, le délégué de l'université McGill pour le congrès. Les deux hommes font plusieurs arrêts en chemin pour visiter des universités, des musées et des jardins botaniques. Malgré qu'il soit indisposé, le frère Marie-Victorin est curieux et a soif de découvertes.

Ils arrivent à leur lieu de rendez-vous le 17 juillet. Sur le bateau qui amènent les congressistes à Cape Town, le frère Marie-Victorin fait de nombreuses rencontres dont celle de l' abbé Breuil, un Français, autorité mondiale en préhistoire, qui lui fait une forte impression. Au congrès, le frère Marie-Victorin donne une communication très appréciée de ses collègues : Some Evidence of Evolution in the Flora of Northeastern America.


Détours et retour

Marie-Victorin en Égypte Le congrès terminé, le frère Marie-Victorin et le professeur Lloyd s'embarquent pour une riche expédition. Le botaniste religieux veut étudier les flores de l'Afrique. Ils font d'abord un court séjour à Johannesburg, puis traversent la Rhodésie et le Mozambique. À Zambèze, aux confins du Zimbabwe et de la Zambie, ils s'exclament devant les magnifiques chutes Victoria, hautes de 108 m.

Reprenant la route, les deux voyageurs s'embarquent à Beira pour Mombasa (Ouganda). Ils font escale à Zanzibar, porte d'entrée des Asiatiques en Afrique, puis se rendent au lac Victoria. De retour à Mombasa, ils s'embarquent pour Port Soudan sur la mer Rouge, traversant l'Étiophie. De Port Soudan, ils prennent un chemin de fer trans-égyptien et, suivant le Nil, traversent l'Égypte où ils visitent le tombeau de Toutankhamon, dans la Vallée des Rois. Le train les mène ensuite au Caire, puis à Jérusalem. Le frère Marie-Victorin en profite pour se recueillir un moment sur le tombeau du Christ et pour étudier l'environnement biologique de la Mer Morte. Le chemin de fer les mène ensuite jusqu'à Constantinople, puis Prague.

Enfin, les voyageurs remontent jusqu'en Allemagne, traversant la Bulgarie, la Yougoslavie, la Hongrie et la Tchécoslovaquie. Partout, ils visitent les jardins botaniques. De retour à Paris, le frère Marie-Victorin se rend saluer Henri Prat et l' abbé Breuil, qui est de retour chez lui. Il fait ensuite un saut à Bruxelles pour voir le frère Réole, premier illustrateur de ses travaux scientifiques. Enfin, les deux voyageurs s'embarquent sur l'Empress of Australia à Cherbourg, le 14 novembre, pour retourner au pays.

Le frère Marie-Victorin rapporte de son voyage un manuscrit de plus de 400 pages constitué de notes et d'observations ainsi que plus de 4 000 photographies. Sa famille est heureuse de le voir. Sa soeur, mère Marie-des-Anges, est surtout soulagée. L'état de santé de son frère l'inquiète toujours au plus haut point, surtout lorsqu'il part ainsi en expédition!


Autres expéditions

Les Frères Marie-Victorin et Rolland-Germain Au cours de cette période (1920-1934), le frère Marie-Victorin effectuera plusieurs courts voyages d'exploration. Il a notamment herborisé dans la région du lac Saint-Jean (1921), de la Gaspésie (1923), des Grands Lacs (1932) de même que dans la vallée de l'Outaouais et dans le nord du Québec (Abitibi et Témiscaminque, 1933).


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