Premières herborisations et explorations
Le jeune frère se passionne toujours plus pour
la nature et les fleurs. Son père ne se doute pas que le
microscope qu'il lui a offert marque en fait la naissance de la science botanique au Québec !
Avec La Flore canadienne de
Provancher que lui a procurée son directeur, il explore d'abord les environs
du Collège de Longueuil. L'endroit présente une situation géographique avantageuse pour des explorations botaniques variées.
En 1915, il herborise en compagnie du
Frère Rolland-Germain, qui vient d'entrer en fonction au Collège. Le Frère
Rolland-Germain est un botaniste expérimenté. Au cours des années qui suivront, ils exploreront ensemble plusieurs lieux
du Québec.
Rien ne les arrête. Surtout que le frère Marie-Victorin s'est procuré la flore d'Amérique du Nord écrite
en anglais par
Britton et Brown. Il organise son savoir : " (…) dorénavant, il enregistre toutes ses cueillettes avec
leur nom latin suivi de l'auteur qui l'a attribué " (Gilles Beaudet,
Le Frère Marie-Victorin, p.14) Il continue ses explorations. Parmi les lieux explorés, on
retrouve, de 1905 à 1912 : St-Ferdinand d'Halifax, le Mont-Beloeil, le fort Chambly, Boucherville, Saint-Lambert,
Saint-Hubert; Saint-Hippolyte, le lac Connoly, la rivière Bécancour, Thetford-Mines, Beauport, le Cap Tourmente, et
bien d'autres encore.
De 1913 à 1920, les deux botanistes herboriseront à Ottawa, dans la vallée de l'Outaouais, dans la
région de Témiscouata, à l'Île-aux-Coudres, à l'Île d'Anticosti et au Témiscamingue. Toutes ces excursions amènent
le frère Marie-Victorin à rêver d'une nouvelle flore du Québec.
En 1912, il apprend que la Société québécoise pour la protection des plantes a l'intention de rééditer
la flore de Provancher. Bien qu'il apprécie, malgré ses déficiences, l'ouvrage de Provancher, il s'insurge : " La
proposition de réimprimer l'œuvre de Provancher est plutôt un aveu d'impuissance; pour dire mon avis en peu de mots,
je considère une telle réimpression, si on conserve l'ensemble de l'ouvrage, comme un pas en arrière "
(Gilles Beaudet, Le Frère
Marie-Victorin, p.15).
Il ébauche un grand, un magnifique projet : écrire une nouvelle flore du Québec. Il
ne sait pas encore qu'il lui faudra, pour cela,
près de 25 années d'inlassable travail.
Échanges et collaborations
Son apprentissage de la botanique ne se fait pas seulement sur le terrain ! À peine entré au Collège de
Longueuil, il a entrepris d'établir son réseau. Il contacte de grands spécialistes
et poursuit sa correspondance avec le professeur
Merritt Lyndon Fernald. Il écrit
au frère Anatolien, fondateur de l'Instituto cientifico de Zacatecas au Mexique (journal intime, 8 déc. 1908) et demande
au
frère Léon, qu'il a connu en 1905 à Longueuil et qui œuvre à Cuba, une flore de ce pays.
Il correspond également avec Norman Criddle au Manitoba, Georges H. Conklin au Wisconsin et Otto Leohnardt,
un botaniste saxon. Il propose à Leohnardt des échanges de plantes. En France, il a deux importants correspondants dont un
spécialiste de la flore d'Auvergne, vraisemblablement le frère Héribaud.
Plus près de lui, le professeur
Francis-E. Lloyd, du département de botanique de l'université McGill, lui
prête un livre, Principles of Breeding, dans lequel le frère découvre les lois de Mendel, fondement de la science
nouvelle de la génétique. Il est emballé. De plus, Mendel est non seulement botaniste, mais religieux. Suite à cette lecture,
il prépare avec enthousiaste, un article pour le
Naturaliste canadien qui pourfendra les théories évolutionnistes de Darwin
en s'appuyant sur les lois de Mendel.
Premières publications
Parallèlement à ses explorations, à ses échanges et à ses collaborations, le jeune frère a entrepris la lecture
à rebours de la revue Le Naturaliste canadien, fondée par
Léon Provancher et repris plus tard par le chanoine Huard. Il remonte les numéros jusqu'en 1871. Il y publie, en 1908,
Additions à la Flore d'Amérique et en 1909, Contribution à l'Étude de la flore de la Province de Québec. Il prépare d'autres
communications.
Ses explorations avec le frère Rolland-Germain dans la région du Témiscouata ont été fertiles. Elles mènent,
en 1916, à une publication :
La Flore du Témiscouata, qui devient la 6ième des Contributions du Laboratoire de botanique du
Collège de Longueuil. Le frère Marie-Victorin publie également des articles dans plusieurs revues à saveur scientifique dont
l'Ottawa Naturalist et le Bulletin de la Société de Géographie de Québec. Il rédige également un grand article pour la Revue
Trimestrielle Canadienne et publie deux importants écrits, à tendance plus littéraire que scientifique : les
Récits laurentiens, en 1919, et les
Croquis laurentiens, en 1920.
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