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Commémoration du 50e anniversaire du Département d'études françaises (1)


Pavillon principal de l'Université de Montréal 1963 (2)

Le Département d’études françaises prend sa place

La première université francophone et catholique à Montréal voit le jour en 1878 par l’entreprise de Monseigneur Ignace Bourget qui, avec la bénédiction de l’Église, ouvre une succursale de l’Université de Laval à Montréal.  Quoique l’Université de Montréal ne devienne indépendante qu’en 1919, l’établissement scolaire fait ses preuves et forme des Canadiens français dans trois domaines d’études classiques (théologie, droit et médecine).  Entre 1920 et 1925, diverses facultés sont créées (philosophie, lettres, etc.) pour permettre une plus grande notoriété dans le monde universitaire.  Malgré des difficultés financières lors de la crise économique des années 1930, l’Université de Montréal survit et s’impose en recherche dans différents domaines tels que la médecine, la psychologie, le nucléaire, etc.

À la suite d’une division de l’ancienne Faculté des lettres (fondée en 1927 pour permettre une adaptation à la vie universitaire, aussi appelée « Faculté des collèges » et dirigée par monsieur René de Chantal), le Département d’études françaises voit le jour en 1961-1962.  Il comptait alors neuf professeurs réguliers, dont René de Chantal, Michel Mansuy, Monique Bosco, Albert Le Grand et Claude Dansereau (3), et il était dirigé par monsieur Bernard Beugnot.

Monique Bosco (4)
Monique Bosco (4)
Albert Le Grand 1958 (5)
Albert Le Grand 1958 (5)
De gauche à droite : Bernard Beugnot et Pierre Dagenais, Doyen de la Faculté des lettres, Montréal 30 mars 1967 (6)
De gauche à droite : Bernard Beugnot et Pierre Dagenais, Doyen de la Faculté des lettres, Montréal 30 mars 1967 (6)

À ses débuts, le Département d'études françaises était hébergé dans le pavillon principal.  Par contre, en 1968, il prend possession de ses actuels locaux dans le pavillon Lionel-Groulx à la suite du début des travaux de construction de trois pavillons, dus à une forte croissance des étudiants et à la multiplication des facultés de l'université. Les débats transcrits au procès-verbal de la 36e réunion du conseil du Département d'études françaises, en 1967, permettent de constater les soucis de la communauté professorale par rapport aux prévisions de l'augmentation de la population étudiante.

Du modèle français au modèle américain

Le Département d'études françaises concentre ses activités d'enseignement sur plusieurs certificats qui font leur apparition dès les premières années de vie du département.  Le certificat d'études générales, le certificat de littérature française et celui d'études supérieures sont les premiers certificats qui sont enseignés au département, mais dès 1964, le certificat de littérature canadienne fait son entrée dans le programme d'études par l'initiative d'Albert Le Grand.  Ce certificat canalise ses cours sur les textes canadiens et québécois pour leur donner une plus grande place au sein de l'enseignement.  Dans la même année, le certificat de grammaire et philosophie française est mis sur pied pour élaborer l'étude des textes anciens par des cours sur la phonétique et les particularités de la langue française.  D'autres certificats voient le jour au cours des premières décennies.  Ainsi, le certificat de littérature comparée est élaboré dès décembre 1964 pour offrir la chance aux étudiants d'étudier les différentes littératures existantes dans les autres pays et de les comparer avec la littérature canadienne.  Également, le certificat d'esthétique littéraire voit le jour dans les années 1964-1965 et permettait aux étudiants d'analyser les S'ouvres selon plusieurs théories critiques.  N'offrant que des certificats, le Département d'études françaises décide, en 1969, d'abandonner sa licence de quatre certificats construite sur le modèle français et de concentrer ses cours dans un baccalauréat de 90 crédits selon le modèle américain.  De plus, le département laisse tomber ses certificats d'études supérieures pour offrir une maîtrise et un doctorat en littérature française.  Ces nouveaux programmes évolueront au fil des années et offriront plusieurs cours sur les quatre thèmes centraux fixés au département: histoire et théorie littéraires, études québécoises, littérature française et poétique.

Mise en valeur de la littérature nationale

Le certificat de littérature canadienne a été créé en 1964 au moment des changements sociaux et politiques qui ont marqué une époque.  Ce certificat répondait aux besoins des étudiants et à la croissance de la production littéraire canadienne-française qui cherchait à représenter les valeurs, les aspirations et les rêves de la société québécoise.  À ce sujet, deux articles du 27 février 1962 écrits dans le journal hebdomadaire Le Quartier Latin (7) de l'Association d'étudiants de l'Université de Montréal montrent l'intérêt des professeurs et des étudiants à favoriser l'épanouissement d'une littérature canadienne française en incitant les lecteurs à découvrir et s'approprier les Oeuvres de littérature québécoise.

L'instauration de ce programme est un évènement sans précédent dans l'éducation de cycle supérieur au Canada: « [p]our la première fois dans l'histoire des universités canadiennes de langue française, une Faculté des lettres inscrit à son programme un certificat de littérature canadienne » (8).

René de Chantal, 1965 (9)
René de Chantal, 1965 (9)

Les fonds du Département d'études françaises révèlent la vision et les efforts des autorités universitaires dans la constitution d'un corps professoral hautement compétent et avec les qualifications nécessaires afin d'offrir aux étudiants un enseignement de qualité et de renforcer le prestige de l'Université. Les premiers professeurs nommés par le département sont des personnalités reconnues dans le milieu littéraire, telles que M. René de Chantal, M. Bernard Beugnot et M. Michel Mansuy, issus d'universités françaises et canadiennes.

Conférences de J.A DeSève

Un des principaux soucis du Département d'études françaises était l'organisation d'activités orientées vers la diffusion de la culture canadienne française.  C'est ainsi qu'en 1963, avec le soutien financier de monsieur J.-A DeSève, industriel montréalais (10), est lancée une série de conférences, portant le nom de son bienfaiteur, qui vient à s'inscrire dans le contexte de la Révolution tranquille et du grand mouvement visant l'émancipation et la valorisation du fait français au Canada.  Les conférences sont aussi considérées comme le point de départ, parmi d'autres, de la consolidation de la littérature québécoise.

Les Conférences se sont déroulées de 1963 à 1968 réunissant des étudiants, des professeurs, des éditorialistes de journaux et de revues, des écrivains et le public lettré de Montréal.  Au fil du temps, celles-ci deviennent l'espace privilégié pour le débat, les échanges des idées et la critique littéraire.

Les dissertations et les oeuvres présentées lors de ces évènements ont été recueillies et publiées, contribuant à la dissémination de la connaissance et de l'étude de la littérature canadienne française, ainsi qu'à l'augmentation de l'intérêt du public.  Dans ce sens, les étudiants et les chercheurs concernés y trouvent une mine d'informations inestimables pour approfondir leurs travaux dans ce domaine.

Centre d'études et de recherches

En 1975, le Centre d'études québécoises (C.É.T.U.Q.) marque le département lors de son ouverture par son prolongement au Centre de documentation en littérature canadienne-française fondé en 1964. À l'automne 2002, le CÉTUQ, le CRELIQ de l'Université de Laval et une équipe de chercheurs de l'Université du Québec à Montréal fusionnent pour former le CRILCQ (11) (Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises).  D'autres centres de recherches s'installeront dans le Département d'études françaises pour agrémenter les recherches et les conférences.  Ainsi, le Centre (12) et le Centre Hector-De-Saint-Denys-Garneau (13) font leur apparition pour compléter les recherches sur la littérature et la poésie québécoise.

Revue d'études françaises

En février 1965, le Département d'études françaises lance la revue Études Françaises, qui a été dirigée par les professeurs du département, tels que René de Chantal (fondateur), Georges-André Vachon, Laurent Mailhot, Robert Melançon, Ginette Michaud, Lise Gauvin, Pierre Nepveu.  Ce titre qui faisait appel au département créateur était accompagné au début par le sous-titre: revue d'études françaises et canadiennes-françaises, et réaffirmait déjà sa vocation de donner la place et l'importance à la littérature du Canada francophone.  Ce périodique est la première revue universitaire au Québec engendré par le mouvement d'innovation qui a touché le Département quelques années auparavant.  Le grand succès de la publication pendant ses premières années fera en sorte que la revue passe de trois à quatre numéros par an.

Le projet initial de la revue comprenait quatre parties: articles; comptes rendus de livres, études, thèses, etc.; une bibliographie de la littérature canadienne et une chronique de la Faculté.  Mais avec le temps, on y ajoute des dossiers thématiques, ainsi que d'autres manifestations comme les entrevues ou les chroniques.

Sa rédaction prenait en compte la littérature française et la littérature canadienne-française enseignées au département.  Les objectifs poursuivis et attestés par ses membres étaient d'établir les liens avec des universités américaines, et de propager la littérature européenne et canadienne à travers la diffusion des études venant de l'Europe et celles de la littérature canadienne-française.  Il s'agit, avant tout, d'un moyen d'études et de critiques de la littérature francophone, ainsi comme une plate-forme pour les écrivains canadiens de langue française.

C'est en décembre 1967 et suite à ses objectifs de diffuser la littérature francophone que la revue annonce l'apparition du Prix de la revue Études Françaises.  Avec le soutien de l'imprimeur J.A.Therrier, il est décerné pour la première fois en janvier 1968.  C'est Ahmadou Kourouma, écrivain originaire de la Côte d'Ivoire, avec le roman Les Soleils des indépendances, en 1968, qui ouvre la liste des lauréats parmi une centaine de candidatures.  Il est suivi par  Gaston Miron (1970), Juan Garcia (1971), Michel Beaulieu (1973), Fernand Ouellette (1974), Jean-Yves Soucy (1976) et Makombo Bamootê (1980).  Entre 1980 et 1995, le prix disparait, mais à l'occasion du 30e anniversaire de la revue, sous la direction de Lise Gauvin, le prix revient.  En 1995, le prix est octroyé à un essai et est alors doté d'une bourse de 5000$.  Depuis ce moment, une série d'écrivains suivent le chemin interrompu en 1980; ainsi Assia Djebar (1999), André Major (2001), Pierre Vadeboncoeur (2003), Laurent Mailhot (2005), Georges Leroux (2007) et Hélène Dorin (2009) prendront une part de l'histoire de la revue  en recevant ce prestigieux prix.  Encore aujourd'hui, la revue est présente dans l'univers de la critique littéraire.

« Le Prix de la revue Études Françaises demeure donc un prix de « découverte », intitulé pour stimuler la création littéraire, au Québec et dans les pays de la Francophonie. (14) »

50 ans après

Le nombre d'étudiants à fréquenter le département dans ses premières années de fonctionnement était de l'ordre de 500 étudiants.  À l'époque, on prévoyait une augmentation considérable pouvant atteindre le chiffre de 600 étudiants (15).

Ces calculs ne sont pas contraires à la réalité vécue 20 ans après.  En effet, de 1987 à 1988, le Département d'études françaises comptait au 1er cycle 360 étudiants, au 2e cycle 164 étudiants et au 3e cycle 6316.  Une décennie plus tard, pour la période de 1999-2000, 298 étudiants sont inscrits au 1er cycle, 104 au 2e cycle et 68 au 3e cycle.  Une légère tendance à la baisse a été constatée dans la dernière période; néanmoins, les chiffres se montrent stables (17) pour les prochaines années.

Actuellement, le Département d'études françaises comprend vingt-six professeurs qui se sont spécialisés dans différents domaines: de la renaissance à l'époque moderne, en passant par l'histoire littéraire et la poétique, la sociologie et la psychanalyse, la recherche et la critique, et la création, car nombre d'entre eux ont écrit différents textes critiques et littéraires.

Avec la commémoration des 50 années de son existence, le Département d'études françaises de l'Université de Montréal et ses actuels membres prennent la relève de ses mythiques prédécesseurs.  Après un demi-siècle et avec l'enseignement et la recherche comme principal but, le Département continue ses projets mis en Suvre au long de ces années, mais aussi en offrant de nouvelles initiatives poursuivant les caractères innovateurs et dynamiques qui l'ont caractérisé tout au long de son histoire.

L'histoire du Département des littératures de langue française n'est pas celle d'une série de révolutions ou de mutations brusques au gré des modes successives qui ont occupé le devant de la scène littéraire; elle est au contraire celle d'une continuité et d'une fidélité, d'évolutions progressives qui ont incorporé le nouveau, élargi et diversifié les enseignements.  Le carrefour de ces activités reste la littérature, avec ce que le terme peut avoir d'indéfini aujourd'hui, happé qu'il est par des disciplines ou des sciences qui revendiquent sur lui pleine juridiction.  Sans s'identifier à une méthode ou à une théorie, le Département d'études françaises fait des oeuvres le lieu ultime de leur application. (18)

Gabriela Ceron Ramirez, Marianne Ferragne et Rebeca Lluesma Sales

Notes:

(1) Ce texte a été originalement produit à l'École de bibliothéconomie et des sciences de l'information, de l'Université de Montréal, dans le cadre du cours ARV1056  Diffusion, communication et exploitation, donné au trimestre d'hiver 2011 par Monsieur Yvon Lemay.  Nous aimerions remercier Madame Monique Voyer du Service de la gestion de documents et des archives de l'Université de Montréal pour son aide et ses précieux conseils.

(2) Source de la photo: Division de la Gestion de documents et des archives, Université de Montréal. Fonds du Bureau de l'information (D00371FP05011.jpg)

(3) Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Secrétariat général. (D35). C13.42

(4) Source de la photo: Division de la Gestion de documents et des archives, Université de Montréal. Bureau des communications et des relations publiques (D67).

(5) Source de la photo: Division de la Gestion de documents et des archives, Université de Montréal. Fonds du Bureau de l'information (D0037 IFP 0362).

(6) Source de la photo: Division de la Gestion de documents et des archives, Université de Montréal. Fonds du Bureau de l'information (D0037 1FP 3425)

(7) André Brocu. 27 février 1962. Littérature canadienne-française. Le Quartier Latin XLIV, no 39: 1

(8) Paul Wyexyaski. 27 février 1962. La littérature dans l'horizon de ses valeurs véritables. Le Quartier Latin XLIV, no 39: 2-4

(9) Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Département d'études françaises (E12). Contenant 2771. Littérature canadienne

(9) Source de la photo: Division de la Gestion de documents et des archives, Université de Montréal. Association des diplômés de l'Université de Montréal (P0017 IFP 04589)

(10) Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Bureau de l'information, D37/B13.3. Communiqué de presse

(11) CRILCQ. Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises. www.crilcq.org (consulté le 4 avril 2011)

(12) Centre d'archives Gaston-Miron. Centre d'archives Gaston-Miron. www.crlq.umontreal.ca (consulté le 4 avril 2011)

(13) Centre Hector-De-Saint-Denys-Garneau. Centre Hector-De-Saint-Denys-Garneau. www.crilcq.org/centregarneau/default.asp (consulté le 4 avril 2011)

(14) Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Bureau de l'information(D37). Contenant B 13.3. Prix de la revue Études françaises.

(15) Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Département d'études françaises (E12). 15-Procès-verbal du Conseil 1963-1967

(16) Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Département d'études françaises (E12). Contenant 2499. Rapport annuel 1987-1998

(17) Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Département d'études françaises (E12). Contenant 4231. Rapport annuel 1999-2000

(18) Université de Montréal. Département des littératures de langue française. http://www.littfra.umontreal.ca/presentation.html (consulté le 2 avril 2011)

Sources consultées:

André Brocu. 27 février 1962. Littérature canadienne-française. Le Quartier Latin XLIV, no 39: 1

Centre d'archives Gaston-Miron. Centre d'archives Gaston-Miron. www.crlq.umontreal.ca (consulté le 4 avril 2011)

Centre Hector-De-Saint-Denys-Garneau. Centre Hector-De-Saint-Denys-Garneau. www.crilcq.org/centregarneau/default.asp (consulté le 4 avril 2011)

CRILCQ. Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises. www.crilcq.org (consulté le 4 avril 2011)

Division de la Gestion de documents et des archives, Université de Montréal. Association des diplômés de l'Université de Montréal (P0017 IFP 04589)

Division de la Gestion de documents et des archives, Université de Montréal. Bureau des communications et des relations publiques (D67).

Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Département d'études françaises (E12). Contenants 2771, 2499, 4231, 5072.

Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds de la Faculté de lettres (E97). Contenant 1277. Projet d'une revue du département d'études françaises.

Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Bureau de l'information (D37). D37/B13.3, D37/ IFP0362, 1FP05011, 1FP3425

Division de la gestion de documents et des archives, Université Montréal. Fonds du Secrétariat général. (D35). D35/C13, 42, 50, 51, 57. Faculté des lettres

Études françaises: index 1965-2000. Montréal: Les Presses de l'Université de Montréal, 1999.

Études françaises. Montréal: Les Presses de l'Université de Montréal, 1965 .vol.1, no 1 et 2.

Études françaises. Montréal: Les Presses de l'Université de Montréal, 1995 .vol.31, no 2.

Paul Wyexyaski. 27 février 1962. La littérature dans l'horizon de ses valeurs véritables. Le Quartier Latin XLIV, no 39: 2-4

Pierre-Philippe Gingras. 8 décembre1986. Le Département d'études françaises fête ses vingt-cinq ans. Forum, p.5

Université de Montréal. Département des littératures de langue française. http://www.littfra.umontreal.ca/presentation.html (consulté le 2 avril 2011)

Université de Montréal. L'UdeM aujourd'hui, Notre Histoire. www.umontreal.ca/udem-aujourdhui/fr/histoire/1878-1919.html (consulté le 2 avril 2011)