Une carrière multiforme (1930-1947)
« Comme la vie a dû changer pour vous, mes amis! Il est difficile de se représenter ce qu’est votre existence d’aujourd’hui dans ce cadre canadien si mystérieux pour nous. La nature doit être un peu comme en Russie – de vastes étendues[,] des forêts[,] des rivières d’une largeur inconnue en Europe, des étés hâtifs et violents et de longs hivers. Je crois que c’est un bon milieu pour créer et pour vivre une existence intense et profonde. »
Lettre de J. et E. Zarmowski, 22 mai 1930
À l’aube des années 1930 Auguste Descarries et son épouse Marcelle quittent un Paris en pleine ébullition culturelle, pour regagner le Québec. La décennie qui s’ouvre au jeune musicien sera marquée par une activité professionnelle intense et variée, mais également par de grandes désillusions.
Le choc du retour
Encore enivré de la vie culturelle et musicale parisienne, Auguste Descarries est déterminé à transmettre aux Québécois sa passion et les connaissances acquises auprès de ses maîtres européens. Toutefois, le Québec qu’il découvre à son retour, à la fin de l’année 1929, est paralysé par la Grande Dépression. En outre, le cinéma parlant et l’essor de la radio insufflent un changement profond dans le milieu musical classique, tandis que les quelques postes d’enseignant prestigieux sont déjà occupés par des musiciens mieux « réseautés » que Descarries. Ce retour au pays est teinté de désenchantement et d’une certaine amertume.
Marcelle, un soutien de tous les jours
À travers l’activité frénétique, les luttes et les désillusions qui marquent son parcours professionnel, Auguste trouvera en son épouse une alliée fidèle et combative. Marcelle usera de sa verve et de ses relations pour favoriser l’avancement de son époux et améliorer la situation financière de sa famille, poussant l’audace jusqu’à s’adresser au premier ministre du Québec, Maurice Duplessis. Uni dans le bonheur comme dans l’adversité, le couple aura trois enfants : Michel (1930-2013), Laurent (1939-2012) et Francine (1942-).
Un travailleur infatigable, un créateur insatiable
« Quand je retournerai au Canada, j’en saurai tellement que, même si j’en perdais tous les jours, il m’en restera encore assez pour en faire profiter les autres », avait exprimé Descarries avant son retour au Québec. Aussi, la vie musicale à Montréal, au cours des décennies 1930 et 1940, sera enrichie par son enseignement, ses concerts, ses chroniques et articles pour les journaux, ses conférences, ses fonctions d’organiste et de maître de chapelle et ses nombreuses compositions (environ 90). Promesse tenue.
Une œuvre phare : Magnificat pour chœur à 4 voix égales
Dans les années 1930, l’activité intense de Descarries se déploie dans toutes les directions. On le trouve même à l’église, en particulier à Outremont où il occupera les fonctions d’organiste à l’église Saint-Germain, puis de maître de chapelle à Saint-Viateur. C’est en 1935 qu’il compose ce Magnificat, cantique de la Vierge Marie à l’annonce de sa maternité. Outre qu’il s’agit d’une pièce majeure dans la production de musique sacrée de Descarries, elle est l’une de ses très rares œuvres à avoir été publiées à son époque, soit en 1961, quelque trois ans après sa mort.
Le motet présenté ici est interprété par Les Chantres Musiciens, sous la direction de Gilbert Patenaude (2012). Il est tiré de l'album Auguste Descarries, Œuvres sacrées pour chœur, solistes et orgue, et diffusé avec l’aimable autorisation de Martin Duchesne de la Société métropolitaine du disque / Espace 21.