La petite histoire des grandes facultés: la Faculté de droit
Article paru dans FORUM: 12 novembre 2007
L’enseignement du droit en français à l’Université Laval de Montréal débute en 1878 sous les recommandations de Mgr Bourget. Des débuts très modestes, car la nouvelle faculté ne dispose que d’une salle mise à sa disposition par les Sulpiciens. Ce n’est qu’en 1895 qu’elle pourra occuper deux salles de classe dans le bâtiment universitaire situé rue Saint-Denis afin d’accueillir ses 125 étudiants. La Faculté déménage finalement en 1942 dans le nouvel immeuble central de l’Université de Montréal construit sur la montagne. Depuis 1968, elle est installée dans le pavillon Maximilien-Caron.
L’année 1944 sera une étape majeure dans l’évolution de la Faculté; Maximilien Caron est nommé premier professeur de carrière. Ses prédécesseurs avaient principalement été des praticiens venus communiquer leurs expériences pratiques aux étudiants. Grâce à l’initiative et aux convictions de son professeur, la Faculté se dote d’une véritable pensée universitaire et l’on y encourage progressivement la recherche. «L’on ne se contente plus de former de simples praticiens, l’on tente de plus en plus de contribuer à l’avancement des sciences juridiques.» Au début des années 50, l’enseignement du droit passe de trois à quatre ans; cette décision ne fait pas l’unanimité même si elle permet aux étudiants qui le désirent de rédiger une thèse et d’accéder à la maitrise en droit. Au cours d’une entrevue accordée au journal Le Quartier latin en 1953, Maurice Duplessis, alors premier ministre du Québec, commente cette décision avec la verve qui le caractérise: «Voici ce que j’en dis: vous êtes certainement aussi intelligents que dans mon temps, et dans mon temps il n’y avait que trois ans.» L’ajout d’une année a toutefois permis l’engagement de nouveaux professeurs et l’organisation de salles de travaux pratiques et du tribunal-école.
Le tribunal-école permet aux étudiants de s’entrainer à plaider. Toutes les étapes d’un véritable procès s’y déroulent, l’objectif étant de reproduire autant que possible la réalité. L’étudiant rencontre son client, perfectionne ses techniques d’entrevue, consulte les volumineux ouvrages de droit, enregistre sa cause au greffe du tribunal. Les clients sont personnifiés par les professeurs de la Faculté. Les cas choisis sont fictifs mais souvent inspirés de causes déjà entendues. Les étudiants plaident devant un vrai juge et les témoins sont des étudiants ou des professeurs. Un de ceux-ci, Albert Mayrand, affirme que «les étudiants prononcent souvent de magnifiques plaidoyers. Il arrive même qu’ils dépassent en éloquence et en persuasion les avocats professionnels réputés.»
Les étudiants en droit travaillent certes beaucoup, mais ce ne sont pas nécessairement des anges. Maximilien Caron rapporte en 1944 un nombre considérable d’absences aux cours. Un rapport mensuel sera même adressé aux parents de tous les étudiants ne pouvant justifier leurs absences. Quelques années plus tard, on décidera de faire sonner une cloche avant les cours et de fermer les portes des salles des classe afin d’inciter les étudiants à ne pas arriver en retard.
L’histoire ne dit pas si cette mesure a eu un effet sur les retardataires!
Sources:
Division des archives, Université de Montréal. Fonds du Secrétariat général (D0035).
Division des archives, Université de Montréal. Fonds de l’Association des diplômés de l’Université de Montréal (P0017).
Division des archives, Université de Montréal. Fonds de l’Association générale des étudiants de l’Université de Montréal (P0033).